La Bête Noire
Julie MONGUILHET
Je sais mieux que personne comme l'hiver peut être froid et impitoyable autour des terres d'oncle Sam. Je n'ai pas besoin qu'on me le rappelle, car je revois parfaitement la neige grossir, le vent se lever et le froid devenir seul maître de cette région. Je pense être la mieux placée pour raconter ce qui... ce qui... ? Quelle était la suite déjà ?
SOMMAIRE :
Chapitre 1
Mon oncle Sam a toujours détesté organiser les choses. C'est pour cette raison que je n'ai pas été le moins du monde surprise lorsque la porte d'entrée de son chalet était fermée. J'observais les quelques fenêtres visibles depuis le perron pour voir s'il n'y en avait pas une d'ouverte. Le froid commençait à être terriblement vif et je n'avais qu'une seule envie : me faire une bonne tasse de thé bien chaud. Mais rien.
La bonne avait dû cloîtrer le chalet pour garder la chaleur à l'intérieur. Je ne pouvais pas lui en vouloir, même si à cause de ça, j'allais certainement finir gelée ou perdre un ou deux orteils. Mais la simple idée que, pour une fois dans sa vie, l'intérieur du chalet allait peut-être miraculeusement dépasser les 16°... Je frissonnais d'impatience ! Et cette réaction me fit penser que ce n'était certainement pas que l'impatience qui me faisait frémir. L'air, l'atmosphère, le vent, tout était glaçant. Je devais rapidement rentrer à l'intérieur.
Je hurlais brusquement à plein poumon en appelant la bonne à l'aide. J'attendis un instant, et n'entendant aucune réponse, je réitérais mes appels au secours. Elle devait déjà être partie. Lentement, je repliais mes bras sur ma poitrine et tentais des va-et-vient pour me réchauffer. Mes doigts étaient paralysés, voire congelés. Centimètre par centimètre, je m'accroupissais en position fœtale, jusqu'à poser mon front sur mes genoux. J'avais besoin de conserver la chaleur encore existante dans mon corps.
Je savais d'expérience que cette chute brutale de température n'augurait rien de bon. Dans mes lointains souvenirs, lorsque l'on utilisait encore ce chalet pour se rassembler en famille, pour les fêtes ou les anniversaires, il nous arrivait d'y assister. Assister tout d'abord au vent qui se lève, puis au ciel qui devient monochrome et sombre, avant que les degrés ne s'effondrent violemment. Je me rappelle du givre qui apparaissait de la rainure des fenêtres, jusque son centre. On pouvait parfois observer des dessins que le gèle semblait nous révéler. Le bois de l'édifice craquelait. Le planché grinçait sans que l'on ne marche dessus. C'est comme si la bâtisse prenait vie, avec nous à l'intérieur.
Les adultes nous racontaient des histoires pour ne pas que l'on prenne peur. Mais ils insistaient toujours pour nous empêcher de sortir ou à nous expliquer que si, pour une quelle conque raison, on se trouvait à l'extérieur lorsque la température chutait, on devait absolument rentrer dans l'instant, sans perdre une seule seconde.
« Oncle Sam, je veux vraiment rentrer... mais je ne peux pas... » Murmurais-je.
Mon souffle se fit de plus en plus court, au moins jusqu'à ce que mes tremblements ne cessent. Puis la fine vapeur qui transperçait mes lèvres s'amenuisa de plus en plus, jusqu'à bientôt totalement disparaître.
Bonjour ! Cela fait si longtemps ! J'ai beaucoup de mal à venir régulièrement sur le site pour poster quelques bonnes œuvres. J'ai une liste inouïe de lectures, de corrections et de publications en attentes ! Pardonnez-moi pour ça je vous prie, je fais de mon mieux.
Voilà la première publication d'un roman qui comporte pas mal de chapitres ! Je vous laisse la surprise du nombre, ah ah ah ! J'ai adoré le lire et l'ai dévoré en une nuit. Je me retiendrais d'en dire plus, dans l'optique de vous en dévoiler un peu à chaque sortie ! Au plaisir de vous revoir vite !
Nils K.
Chapitre 2
Un grand fracas me fit sursauter et je me levais d'un bon sur mes pieds. Mais l'instant d'après, je me laissais retomber et me retrouvais les fesses sur le matelas. Je reconnaissais cette chambre.
« Et mince ! Adieu le croissant et la motte de beurre. » Soupira une voix.
C'était la voix d'oncle Sam ! Je l'appelais de ce que me semblait être de toutes mes forces, mais une voix roque et cassante mâchait des paroles que je ne compris pas moi-même. Je me forçais à tousser plusieurs fois tout en essayant de me remettre sur mes pieds. Mais avec douceur cette fois.
Je rejoignis l'embrasure de la porte et reconnu mon oncle que récupérait ce qui aurait dû être mon déjeuner du plancher. Nos retrouvailles plus un grand sentiment de soulagement, m'émurent au point de me mettre les larmes aux yeux. Mais je ne les laissais pas couler et je m'avançais vers lui.
« Oncle Sam... »
Il se retourna et m'afficha un large sourire. Ce même sourire que je lui connaissais depuis toujours. Cela me réchauffa le cœur si fort que je récupérais mes forces plus vite que si j'avais dévoré le plateau repas qui gisait par terre dans son intégralité.
« Oh ma belle et tendre.... Oh ma si belle ! Je suis tellement heureux et... Je suis si content de te voir ! Tu as tellement grandi ! Tu es si belle ! »
Ça aussi, c'était lui tout craché ! Je rigolais bien fort en secouant désespérément de la tête.
« On va te prendre pour un vieux si tu continues à parler comme ça, tu sais ! Et puis ça fait déjà trois ans qu'on ne s'est pas vu. J'espère bien avoir grandis.... »
J'observais mon plus grand complexe qui me tombait toujours pile sous les yeux. Et non, ce n'était pas ma poitrine. Elle était certes menue, mais elle me convenait parfaitement. J'avais trop vécu avec ma tante et mes cousines le problème d'avoir une grosse poitrine, notamment le mal de dos, le problème pour choisir le bon soutien-gorge (et donc un soutien-gorge cher), etc. Mon véritable problème venait de mes cuisses de poulet. Hanche et cuisses épaisses, pour un petit ventre et de fins mollets. Je soupirais malgré moi.
« Quoi que j'aurais aimé grandir un peu moins, murmurais-je pour moi-même.
- Qu'est-ce qu'il y a ? Quelque chose te tracasse avec ton corps ? J'imagine que c'est de ton âge. »
Il leva les yeux au ciel, pensif, pendant que je grommelais quelque chose de pas très joli en finissant de le rejoindre.
« Raaaaah, si tu savais comme ta mère se complexait pour un rien ! Je me souviens encore qu'elle se plaignait souvent de ses pieds... »
Il passa un dernier coup de chiffon au plancher avant de se relever avec le plateau à la main. Il me fit un signe doux de la tête en arborant son éternel sourire. Je compris qu'il me demandait de le suivre. C'est en m'exécutant que ça me revint comme un éclair, alors je le coupais brusquement.
« Mais quand es-tu arrivé ?
- ... sauf pour..., il s'arrêta dans les escaliers. Quand ? Mmh, je dirais il y a une heure. Je suis tout de suite monté te chercher dans la chambre de ta tante. Mais j'ai été surpris de te retrouver dans la mienne ! Tu étais emmitouflée dans mes couvertures, celles d'été comme d'hiver. D'ailleurs, j'espère que tu n'étais pas dehors quand...
-Non, je n'y étais pas ! »
Je le coupais sèchement et le devançais pour rejoindre la cuisine. Il m'observait sûrement avec cette même tête qu'il avait quand il était inquiet. Mais je détournais le regard et mettais de l'eau à chauffer.
Le thé sur la table basse et la tête dans mes bras, je continuais, sans cesser, à tenter de comprendre. La bonne était partie pour passer les vacances avec sa famille. Ce qui était normale vu qu'elle prenait ces congés toujours à la même date, tous les ans, et ce, depuis qu'elle travaille pour oncle Sam. Je n'ai jamais entendu parler d'aucun autre employé engagé dans le chalet. Et oncle Sam n'est venu que pour le déjeuné. Alors que moi... Moi, j'étais là à l'aube.
Qui m'a sauvé la vie ?
Chapitre 3
Juste au cas où j'allais faire un rapide état des lieux. Je prétextais une marche digestive et oncle Sam ne me retint pas, bien qu'il me fît un long monologue sur les consignes de sécurité et les bons réflexes à adopter et bla bla bla. Je sais que le terrain qui entoure le chalet est grand et qu'il y a beaucoup de zones où la forêt dense commence sur notre domaine. Mais je connais ces terres par cœur. Depuis que je suis toute petite... Non, même mes premiers souvenirs ont eu lieu dans le chalet d'oncle Sam.
Du plus loin que je me souvienne, il a toujours arboré ce grand sourire qui faisait ressortir les fines pattes d'oie qu'il avait au coin des yeux. Comme le disait toujours ma tante, oncle Sam à un visage créé pour sourire et rire. D'ailleurs, j'ai beau fouillé dans ma mémoire, je ne l'ai jamais vu en colère, ou énervé, ou frustré, ou mécontent. Je l'ai souvent inquiété et rendu triste lorsque j'étais plus jeune... Non, aujourd'hui encore, je l'inquiète.
« Je vais certainement toujours rester une enfant à ses yeux ! Je soupirais. »
Rien de plus normal en fait. Mais j'aurais quand même espéré paraître plus adulte. Ne serait-ce qu'un peu. Si j'avais pu me montrer mature et responsable, peut-être qu'on m'aurait laissé vivre avec lui, dans ce grand chalet. Et peut-être que de cette façon, oncle Sam aurait été moins seul.
J'avais enfin rejoint l'extrémité du domaine qui offrait une vue globale de tout le terrain. On y voyait le chalet, bien sûr, mais aussi le sentier qui traversait la plaine de la grande route jusqu'à la forêt, les traces de pneus encore fraîches et la voiture d'oncle Sam, la coline qui nous séparait du terrain de Madame et Monsieur Willot, la seconde parcelle de forêt qui contournait notre domaine et, au loin, tout au fond, le moulin. Ce dernier ne fonctionnait évidemment pas, mais il faisait un très bon terrain de jeu de cache-cache lorsque j'étais plus jeune. Oncle Sam n'était pas une seule fois parvenu à deviner la cachette dans laquelle je me trouvais pour toutes nos parties.
« Je me demande s'il le faisait exprès ? Mais c'est vrai que ma cachette me semble encore aujourd'hui introuvable. »
Je ricanais toute seule en prenant une grande inspiration. L'air était encore frais, mais largement plus supportable et bénéfique que le matin même.
Chapitre 4
Le soleil qui traversait les vitres aux aurores était toujours aveuglant. C'est ce que j'appréciais le moins dans la chambre de mon oncle. À l'époque, lorsque je lui en avais parlé, il avait fini par accrocher des rideaux épais comme des troncs d'arbre. J'étais incapable de les ouvrir ou de les fermer sans avoir à l'appeler à chaque fois. J'imagine qu'après trois ans, ce n'est pas étonnant de voir qu'ils n'y sont plus. Je m'assis en tailleur sur le lit et observais cette chambre qui n'avait pas changé. Comment peut-on ne rien changer dans une pièce que l'on fréquente chaque jour, au bout de trois ans ? Les tableaux, les cadres photos, le bureau, les classeurs, le parapluie qui était si dur à ouvrir qu'on préférait souvent prendre la pluie avec oncle Sam. Rien n'avait changé. Rien. Pas même la poussière autour des objets.
J'observais ce fait plus en détail, tout en restant assise à ma place. Elle n'était ni épaisse, ni fine. Juste présente. Les objets n'avaient ni été utilisés, ni bougés d'un poil. Je me rendais alors compte qu'oncle Sam ne dormait peut-être pas dans sa chambre depuis tout ce temps. Peut-être même ne dormait-il pas dans le chalet ? Si ça se trouve, il n'était plus seul non plus... C'est pour ça qu'il m'a parlé de la chambre de ma tante hier ? Il l'avait peut-être préparé et nettoyé pour que je loge dedans le temps de mon séjour ici. C'est vrai que je préférais la chambre de ma tante. Elle était plus grande, plus féminine et le soleil n'y entrait pas le matin.
Mais alors pourquoi j'étais encore là à dormir dans la chambre d'oncle Sam ? Quand est-ce que j'étais montée me coucher hier ? Qu'est-ce que j'avais fait hier soir ?
Je descendais les marches de l'escalier trois par trois et déboulais dans le grand salon comme une furie lorsque l'index en l'air d'oncle Sam me stoppa comme une douche froide. Il était au téléphone. Je pris mon mal en patience et me jetais dans le fauteuil en cuir souple. Je l'observais attentivement pour ne pas le laisser s'éclipser comme il avait l'habitude de le faire. Je le vu à peine éloigner le combiné de son oreille que je m'écriais :
« Qu'est-ce qu'il s'est passé hier soir ? »
Mon ton était sec et certainement un peu brute. Je fis une moue légère pour adoucir son visage allongé par la surprise. Il me fit un petit sourire en venant se coller à moi pour s'asseoir dans le fauteuil une place. Compressés l'un contre l'autre, j'entamais un mouvement pour me relever, mais il me serra dans ses bras et me caressa affectueusement la tête. Je grimaçais salement et cela le fit rire.
« Je ne suis plus une enfant oncle Sam ! Et arrête d'agir comme un vieillard ! Qui tapote la tête de son cadet de cette manière de nos jours ? Franchement...
-Et bien, il y a moi ! Il sourit. Et pour hier, tu t'es profondément endormi en lisant ton bouquin dans la bibliothèque, alors je t'ai monté. Mais pourquoi m'avoir demandé ça avec une telle expression ? Tu es inquiète de quelque chose ? Tu as fait un cauchemar ?
- Dans la bibliothèque ? Je ne me souviens même pas y être allée... »
Il me fit des yeux ronds, abasourdi. Il faillit dire quelque chose, mais je l'arrêtais net en secouant frénétiquement la tête.
« Pourquoi m'avoir couché dans ta chambre ? Tu sais très bien que la lumière du matin est insupportable et me fais me réveiller trop tôt. Je suis en vacances là ! »
J'étirais mes bras au-dessus de ma tête et mes jambes en avant, poussant de ce fait mon oncle Sam, qui gardait le buste hors du fauteuil, mais la main toujours à caresser ma tête. Il rigola doucement et je posais ma joue sur son épaule.
« Vas t'habiller ma belle, tu ne vas pas rester avec ton pyjama toute la journée, si ?
- Et bien, je crois que c'est ce que je vais faire ! Mais un pull ne sera pas de trop. »
Il se releva et me lança le sien qui était plié sur le grand canapé tissé. Je l'attrapais au vol et reniflais une fois pour vérifier s'il ne datait pas d'il y a trois ans lui aussi. Ce geste le fit rire et je me laissais glisser en position fœtale dans le fauteuil, le pull au creux de la poitrine.
« Tu es libre aujourd'hui ? »
Je connaissais la réponse, mais ma petite voix n'avait pas pu s'empêcher de se taire. À la simple vision de ses épaules qui s'étaient imperceptiblement rabattues, je pouvais parfaitement visualiser son visage se rembrunir. J'eus un pincement au cœur et regrettais aussitôt ma question.
« Je suis vraiment désolé ma belle ! Mais le boulot, c'est le boulot ! Faut bien payer le loyer de ce magnifique et sempiternel chalet ! Ajouta-t-il faussement enjoué. »
Je lui lançais un coussin dans le dos et il disparut à l'étage, sûrement pour rejoindre son bureau.
En moins d'une heure, l'ennui vint me tenir compagnie. Et si je puis me permettre, il n'y a rien de pire que sa compagnie. Je rejoignis alors la bibliothèque et cherchais des yeux le livre que j'avais apparemment commencé la veille. Malheureusement, aucun bouquin ne traînait sur la petite table basse ou le bureau. Je n'avais aucun souvenir de ce livre et on dirait bien que la bibliothèque non plus. Je passais un regard rapide dans les rayons à ma hauteur pour voir si un titre attirait mon attention, mais rien. Je regardais plus bas, puis encore plus bas. Finalement, j'allais dans les rayons du haut. Au bout de quelques heures, je n'avais d'autre choix que de m'aider de l'échelle fait à cet effet pour rejoindre les rayons les plus hauts. Je n'avais jamais observé les livres de cet étage, car j'avais toujours eu peur d'utiliser cette échelle. Mon oncle Sam m'assurait toujours qu'il n'y avait vraiment pas de quoi s'inquiéter. Pourtant, je ne pouvais m'empêcher de trouver cette échelle fatalement dangereuse.
Je la mis en place avec le plus grand soin et la secouais de temps à autre pour que, si elle avait à se briser, qu'elle se brise sans moi dessus. Mais rien. Au bout de quelques minutes de profondes réflexions et d'anticipation quant à mon éventuelle chute, je pris mon courage à deux mains (ou plutôt, j'accordais une totale confiance à oncle Sam qui croyait en la solidité de cette échelle) et, un pied à la fois, j'entamais mon ascension. Le bois craquait et grinçait, mes doigts s'agrippaient frénétiquement aux barres transversales et de grosses gouttes de sueur perlaient à mes tempes. Mine de rien, les plus hauts rayons se situaient à plus de trois mètres de hauteur. Une telle chute serait probablement douloureuse...., dans le meilleur des cas. J'accédais bientôt aux dernières marches, mais mon hésitation me fit faire une pause en chemin. J'inspirais et expirais plus fort, me rendant compte que j'étais à bout de souffle, certainement parce que je retenais ma respiration dans les moments les plus critiques, sans m'en rendre compte. C'est alors qu'un livre attira mon attention. Ou plutôt, la reliure d'un livre. Il lui manquait la couverture et de petits et très fins filets dorés ressortaient ici et là.
La curiosité me fit monter une marche sans prendre aucune précaution, et déjà, je tendais la main pour attraper l'ouvrage. Mes doigts le caressèrent tout d'abord, alors je m'avançais un peu plus, glissant mes pieds sur un seul côté de la marche. C'est alors seulement que je parvins à le saisir. Pourtant, il ne sortit pas de sa place. Je mis plus de force et l'agrippais plus fermement, toujours en tirant autant que je le pouvais. L'impatience me gagna et c'est alors que je lâchais ma seule prise sur l'échelle et vint joindre ma deuxième main pour tirer le bouquin. Le voyant se glisser lentement vers l'extérieur, je poussais un soupir de soulagement. Pour en finir rapidement, j'exécutais un sec mouvement en arrière, épaules comprises, afin de totalement l'ôter de sa place. Je réussis brillamment mon entreprise, de même que de détacher l'échelle de sa confortable accroche. J'eus à peine le temps de hurler, que ma conscience me fut arrachée.
Bonjour ! J'ai posté dans un intervalle très court la suite du premier chapitre. Et en plus, j'ai posté plusieurs chapitres ! Oui, je sais, c'est plutôt inhabituelle (si toutefois vous avez déjà pris une habitude par rapport aux publications. Ah ah ah !) Alors, pour m'expliquer brièvement : étant donné que j'ai dévoré cette œuvre, je n'ai pas eu besoin de me demander quand commençait l'intrigue ou quand le récit était un peu plus lent. Alors j'ai conclu que pour certaines œuvres, je me permettrais la publication de plusieurs chapitres ! Voilà tout.
Nils K.
Je vous prie de m'excuser pour les éventuelles fautes grotesques dans le texte. C'est difficile de les repérer au bout d'un certain nombre de lectures ! (je m'excuse aussi une énième fois aux auteurs bien qu'ils m'aient déjà donnés leur bienveillance.)
N'hésitez pas à laisser un commentaire qui sera transmis à l'auteure.
J'espère que cette mise en bouche sera efficace. J'ai eu un peu de mal à choisir le meilleur moment pour m'arrêter ! Mais je pense que là ce n'est pas si mal.
20/01/2019
Chapitre 5
Je me sentais faible, mais toujours capable d'ouvrir les yeux. Je m'entendais marmonner quelque chose, puis un objet fin et froid se cala sur ma lèvre inférieure. J'aspirais instinctivement : de l'eau. Mes paupières se soulevèrent finalement et j'observais le plafond de la bibliothèque. Mon cerveau avait cessé de fonctionner et je ne parvenais ni à réfléchir, ni à émettre d'idée, ni à formuler une pensée. Mon esprit était vide. Mais bientôt, à la vue d'oncle Sam, tout me revint brutalement et je crus faire une crise de panique. Heureusement, j'étais bien trop lessivée pour m'engager dans une démarche si exténuante. Alors je restais là, à observer, le cœur brûlant et déchiré, le visage d'oncle Sam.
Il semblait si désemparé et soucieux, le regard planté sur moi, sa main chaude caressant ma tête. Ses doigts, entortillés dans mes cheveux, me révélèrent que cela faisait un moment qu'il me caressait, doucement, lentement, avec attention et presque fébrilement. Je me mis à pleurer. Tout d'abord, sans un bruit, je fermais les yeux et mordais mes lèvres. Mais oncle Sam glissa son index entre mes lèvres et m'empêcha de m'infliger cette peine. Il récupéra mes larmes tout en essuyant la morve qui coulait à mon nez. Puis, avec tendresse, il effleura mes joues jusqu'à mon menton, et de mes tempes à mes oreilles. Il continua à me toucher et à me cajoler affectueusement, du moins jusqu'à ce que mes pleurs ne cessent.
« Je suis tellement désolé... Je ne ....
- Chut, calme-toi ma belle. Reprends ton souffle et respire. Il y a eu bien plus de peur que de mal. Heureusement, il y a eu bien plus de peur. »
Il m'avait étreint dans ses bras et ses dernières paroles me firent frissonner. J'aurais dû me sentir rassurer. J'aurais dû être soulagée. Mais cela m'effraya légèrement. Et je savais au fond de moi que je n'avais pas saisi la portée de ces paroles.
J'avais rejoint oncle Sam, peu après, dans la cuisine. Je sentais une bonne odeur de pâtes bolognaise et Bon sang ! qu'elle était bonne sa recette de pâtes bolo ! Il n'avait jamais révélé à personne son secret malgré les demandes incessantes de ma tante. J'avais toujours éprouvé une certaine fierté à être celle qui en avait le plus mangé puisque je passais toujours la grande majeure partie de mon temps ici. Je me demande d'ailleurs pourquoi je ne suis pas revenue ici pendant trois ans... Et qu'est-ce qui m'a fait revenir ici ?
Je m'asseyais silencieusement au plan de travail et humais profondément toutes les odeurs d'épices, de viande haché et de sauce tomate. Je ravalais ma salive avant de vouloir me relever pour voir où ça en était. C'est alors qu'oncle Sam se retourna vers moi et me fit un droite-gauche de l'index, accompagné d'un léger sourire. Je voyais bien que les traits de son visage étaient tous contractés et que cela signifiait qu'il n'avait pas encore digéré ma chute. Je me rassis, tout en me souvenant d'une chose étrange. J'observais alors mon corps et palpais mes jambes, de mes orteils jusqu'à mes larges cuisses, puis mon buste et mes bras, et ma nuque, et ma...
« Tu as mal quelque part ? »
Il attrapa ma main, presque brutalement. Le geste et la vivacité de son acte me firent sursauter. Je le dévisageais, incrédule, tout en essayant de récupérer ma main, mais sa poigne était d'acier. Je tirais plus fort dessus, incapable de le faire lâcher prise. Un tremblement me secoua lorsque je me relevais pour m'éloigner de lui. Que se passait-il ? Qu'est-ce qui lui arrivait ? Je n'avais pas osé soutenir son regard ou même redressé ma tête de peur de découvrir son visage. État-il encore mon ...?
« Oncle Sam ! »
Malgré moi, ma voix s'était déchirée dans un hoquet. Je parvins alors à récupérer ma main et toute la force que j'avais mis dans cette manœuvre me fit basculer en arrière. Je retombais lourdement sur les fesses et je ne pus réprimer une grimace de douleur ainsi qu'un petit cri. Les yeux à demi-clos, j'évitais tout contact visuel avec lui. Dans mon champ de vision restreint, je pouvais m'apercevoir qu'il s'était mis à genoux devant moi, face à moi, tout prés de moi. Je gardais ma main sur ma poitrine, l'autre serrant fermement mon poignet endolori. Mes jambes se recroquevillaient imperceptiblement.
« Écoute ma belle. »
Il tenta un contact. Je sentis sa main venir et rejoindre ma tête. Certainement pour une de ses caresses habituelles, celles que je connaissais si bien et que j'appréciais tant. Mais mon visage s'écarta de lui-même tandis qu'un autre hoquet m'échappa.
« Est-ce que je peux m'excuser ? Peux-tu me pardonner ?
- Non ! Expliques-toi ! Qu'as-tu fait ? »
Il retira lentement sa main et se redressa sur ses genoux, toujours le regard planté sur moi, je l'aurais juré. Ses mains glissèrent sur ses cuisses et je crus voir un tremblement chez lui aussi. Mais je n'eus pas le temps de m'y attarder, car la surprise me noua l'estomac et me déchira définitivement le cœur.
« Tu n'aurais pas dû venir cette année, ma belle. Finalement, il fallait que tu ne reviennes plus jamais. Je t'appellerai un taxi, tu repars demain. »
Il se releva, toujours avec cette lenteur qui me faisait frémir. Je voulus pleurer, crier, mais ma gorge refusait d'émettre le moindre son pour l'instant. Je me défis de ma paralysie pour m'agripper au pan de son pantalon. Je m'y accrochais comme on s'accroche à la couche d'un enfant qui serait suspendu dans le vide. Je le sentais au plus profond de mes tripes : si je ne le retenais pas maintenant, je ne le reverrais plus jamais.
« Ce sont des paroles vides de sens pour toi, mais je te le jure que c'est pour ton bien. »
Ma force, mon poids, mon étreinte, rien ne parvenait à l'arrêter. Il continua de marcher, me traînant même sur un mètre, jusqu'à ce que mon corps, avant mon cœur, abandonne. C'est alors que je me mis à hurler, entre mes pleurs et ma douleur.
« Oncle Sam ! Oncle Sam ! »
Je défonçais mes cordes vocales à coup de souffle et d'inspiration, et la seule chose qui parvint à me faire taire, c'est que je perdis ma voix.
24/02/2019
Chapitre 6
Le réveil fut difficile. Jamais réveil n'avait été aussi horrifiant. J'aurais aimé que ce soit un rêve, mais j'avais une preuve douloureuse qui me rappelait que tout cela avait bien eu lieu : ma gorge. Toujours aucun son n'en sortait d'ailleurs. Je tentais de tousser une fois, pour me dégager le passage, mais je faillis m'étrangler par le déchirement cinglant que je ressentis. Je me redressais lentement. J'avais une migraine monstre, les sinus gorgés, les lèvres sèches, un poids sur la poitrine... Je n'avais plus été dans cet état-là depuis ... depuis longtemps maintenant.
La dernière fois, c'était ... Les larmes voulurent revenir, mais j'avais bien trop pleuré pour que quoi que ce soit coule de nouveau de mes yeux. Quand maman et papa sont morts, j'avais aussi fini dans cet état. Mais oncle Sam m'avait redonné goût à la vie. Il avait pris soin de moi et s'occupait de me changer les idées chaque minute de chaque heure de chaque jour. Je n'avais plus pleuré, je n'en avais plus jamais ressenti le besoin. Il m'avait sauvé. C'est d'ailleurs à ce moment-là que je l'ai rencontré. Je l'ai rencontré lui et ... ma tante.
Je m'assis en tailleur dans le lit de ma tante et regardais tout autour. C'était propre, bien rangé, préparé à accueillir quelqu'un. Moi. Les couleurs turquoise et pêche, le coussin au motif fleur de lys, le bureau ovale et la chaise capitonnée. Ce portrait de maman et papa qui trônait sur la coiffeuse et juste à côté, mon diplôme du bac. Ma tante aimait plus que tout au monde ma mère. Elle était si proche qu'elle me considérait parfois un peu trop comme sa fille. Pourtant, j'ai beau regarder les murs, les décorations, j'ai beau chercher fort dans mes souvenirs, je ne me souviens pas avoir vu ma tante dormir ici. À bien y penser, pourquoi cette chambre est la chambre à ma tante ? Qui en a décidé ? On dirait plutôt ... ma chambre non ?
Non ! Bien sûr que non. Oncle Sam a juste dû tout mettre en ordre et ranger pour que je me sente bien dans cette chambre. Je me relevais pour rejoindre la coiffeuse afin de récupérer la photo de mes parents. Ils étaient si beaux, si jeunes. Je me mis à rire en voyant un motif Mickey dans le coin du cadre. Certainement mon bonnet qui apparaissait là. Ma tante adorait maman et elle m'adorait, c'est pour ça que cette photo est là !
Peut-être qu'à force de me le répéter, j'arriverai à m'en convaincre. Car, pour le moment, je ressentais comme un grand vide et un sentiment de doute me submergea.
Je rejoignis la porte avec une boule au ventre. Hier, oncle Sam avait parlé de me renvoyer et qu'on ne se reverrait plus jamais. J'aimerais me rattacher à l'idée que ce n'est qu'une menace faite dans un moment de grande colère. Mais ça ne lui ressemblait pas, et puis, ça n'y ressemblait pas du tout non plus. Je traversais l'embrasure de la porte lorsque je remarquais que j'étais dans les mêmes pyjamas qu'il y a deux jours. Après un profond soupire, j'entrepris de prendre une douche et de me changer.
Il n'y avait plus aucune trace de mon oncle Sam, dans aucune pièce de la maison. En fin d'après-midi, après avoir attendu deux bonnes heures, je m'étais permise d'entrer dans son bureau à pas de félin. Cette pièce m'avait toujours été interdite, depuis.... depuis toujours ? Je ne suis plus certaine des dates et mes souvenirs me font défaut. Chaque fois que j'essaye de toutes mes forces de mettre un âge, à moi, petite fille, avec ma famille, festoyant, s'amusant, rigolant, entre les murs de cette maison, ma tête me fait mal.
La pièce était quasiment plongée dans le noir. J'avançais à tâtons vers le recoin où je soupçonnais l'interrupteur d'être, en me basant sur l'aménagement des autres pièces du chalet. Et bingo, mes doigts y parvinrent. Je pressais alors vivement sur le bouton pour pouvoir me fier de nouveau à ma vue, mais aucune des ampoules du bureau ne s'alluma. Je renouvelais mon action plusieurs fois, et même résultat. Tout en continuant à glisser prudemment le long du mur, je me mis en direction, cette fois, des fenêtres. Enfin, là où je devinais qu'elles étaient. C'est alors que je pus toucher du bout des doigts un tissu épais, rigide et lourd comme le plomb. Je réalisais soudain que ces rideaux étaient ceux qui se trouvaient autrefois dans la chambre d'oncle Sam. De toutes mes forces, je tirais sur le soi-disant tissu afin de laisser ne serait-ce qu'un filet de lumière pénétrer cette pièce. J'étais convaincue qu'oncle Sam n'y était pas, mais j'avais là l'occasion rêvée d'assouvir une curiosité trop longtemps mis à mal.
Après de longues minutes de dur labeur, le rideau laissa enfin percevoir un brin de luminosité. Les carreaux de la fenêtre jaunis et tachetés transformèrent le rayon clair en quelque chose de lugubre. Je frissonnais en reculant de quelques pas avant de me tourner vers l'intérieur du bureau. Il était vide.
Je clignais des yeux plusieurs fois. Puis je me mis à les frotter très fort. Car ça ne pouvait être qu'un de mes sens qui me trompait. Ça ne pouvait être que ça. Il n'y avait pas de bureau, pas de chaise, pas d'étagères, pas de bibelots, pas de tableaux, pas de cadres, pas d'horloge, pas de bibliothèque, pas de porte-documents, pas de calendrier, pas de tiroirs, ... RIEN !
Je me sentis défaillir quand mon instinct agrippa avant moi un bout du rideau. Je retins mon poids quelques secondes afin de me laisser glisser avec douceur au sol. Mon esprit logique me proposait qu'oncle Sam avait pu vider la pièce avant de partir. Que peut-être, les paroles qu'il m'avait dites hier signifiaient qu'il partait aujourd'hui et que ce serait la raison pour laquelle nous ne nous reverrons plus. Mais assise à même le sol, je ne voyais aucune trace d'usure sur le plancher. Pas d'affaissement causé à cause de quels conques meubles, pas de rayures causées par une chaise, ou autres signes distinctifs qu'un parquet peut nous révéler. J'observais alors plus haut. Les murs vides ne divulguaient aucune nuance de couleurs caractérisée par des longs traits rectilignes causés par l'usure et qui attestaient souvent de la présence de meubles et étagères. Seule la détérioration due aux nombres d'années que cette pièce avait bravées marquait les façades.
Ma tête me faisait mal. Et je commençais à douter de tout.
Bonjour ! J'ai parfaitement conscience que cela fait très longtemps que je n'ai rien posté et que j'ai l'air d'avoir délaissé mon site. Mais ce n'est pas le cas, j'ai juste été prise à côté. Je vous prie de bien vouloir m'en excuser ! (au risque de me répéter, c'est fortement probable que cette situation se reproduise à l'avenir).
Voilà deux nouveaux chapitres qui commencent à donner de la couleur à ce roman ! Bien que nous ne soyons pas encore entré dans le vif du sujet (mais bientôt ! Ah ah ah !). J'ai hâte de recevoir vos avis et impressions, que je transmettrais bien évidemment à l'auteur ! Je vous donne rendez-vous à la prochaine publication !